#4 Rejoindre Bialystok

Réunions de famille, je vous aime

Si vous aussi êtes engagé dans une recherche familiale ou généalogique, vous avez peut-être remarqué à quel point les réunions de famille sont propices à la récolte d’informations. Certain cousin au second degré ou certaine grand-tante peuvent détenir de précieux renseignements. Ma famille s’est d’ailleurs habituée à me voir arriver à ces festivités d’anniversaire, de Hanouccah et autres seders armée de mes questions. Elle sait qu’elle aura droit à son inoffensive salve.

Il y a un mois, le cousin de ma mère, Michel, fêtait ses 80 ans. A cette occasion, je sonde oncle et tante : où se trouvent les papiers de mon grand-père, en particulier son livret de famille ? Ce sésame me permettrait de réunir quelques données sur mes arrière-grands-parents pour rebondir vers d’autres découvertes. Et je crains qu’il ait disparu. Soulagement : c’est mon oncle Albert qui l’a. Un rendez-vous est prévu pour que je le consulte.

A ceux et celles intéressés par une recherche analogue à la mienne, je conseille ces occasions festives qui permettent parfois des découvertes inespérées. Comme celle à l’origine de ce blog.

Fixé par la caméra

J’ai promis dans mon billet précédent d’expliquer d’où me vient l’histoire de mon grand-père.

Mes recherches viennent de débuter quand je suis invitée à un autre anniversaire, les 40 ans d’une cousine. Je n’ai alors que des fragments glanés lors de déjeuners chez mon grand-père ou auprès de ma mère.

Nous sommes attablés, oncles, cousins, mère et moi, et je pose ces question sur les années de guerre de mon grand-père qui vont me devenir coutumières. C’est alors qu’un cousin de ma mère mentionne un film. Mon grand-oncle Kuba et sa femme Genia y sont interrogés par une documentariste précisément sur cette période. Rappelons que Kuba a suivi le même périple que mon grand-père.

Personne ne m’avait jamais parlé de l’existence de ce film.

C’est ainsi que j’ai pu visionner ce qui constitue la matière première du récit que vous lisez aujourd’hui.

Et maintenant : Bialystok

Retrouvons ma famille à Malkinia, et écoutons grand-oncle Kuba nous raconter son histoire et celle de sa famille : de ses parents, de son frère Moszek et de son épouse Lonia (mes grands-parents) et de leur fils Samuel.

De la gare de Malkinia, une route mène à la frontière. Mais, pour la rejoindre, il faut passer devant un poste où des Allemands contrôlent les déplacements. Ils frappent les gens qu’ils peuvent atteindre mais ne les empêchent pas de passer.

Ça y est, la famille a franchi la douane et est arrivée dans le no man’s land. A présent ce sont les Russes qui font barrage. Alors ma famille et les autres déplacés « cassent la porte » de la frontière et entrent dans la partie occupée par les Soviétiques. (Que signifie ici « casser la porte de la frontière » ? Kuba n’est plus là pour me l’expliquer.) Ils parcourent ensuite les 90 autres kilomètres qui les séparent de Bialystok à pied, dans le froid. Voir la carte des déplacements.

Quelle est la situation de Bialystok à l’époque ? Elle vient d’être occupée par l’armée allemande en septembre 1939, avant d’être remise à l’Union soviétique, ainsi que l’a prévu le protocole secret du Pacte germano-soviétique. Mais avant cela, à l’image de cette région disputée par les empires, la ville est passée de main en main. Elle appartient à la Russie puis revient à la Pologne indépendante de 1920 à 1939 et est alors rattachée à la République socialiste soviétique de Biélorussie. Avant que la guerre n’éclate, la population juive y est prédominante : environ 75 %.

Arrivés à Bialystok, mes grands-parents et leur famille vivent au jour le jour, dormant dans les synagogues que les Juifs ont réquisitionnées. D’après Kuba, cela dure deux ou trois mois.

A quel point l’histoire de ma famille est-elle singulière, à quel point ordinaire ? Nombreux furent les Juifs qui fuirent la partie polonaise envahie par les Allemands, et nombreux aussi ceux pour qui Bialystok constitua une étape dans leur trajectoire parfois zigzagante pour fuir le nazisme. Entre 1939 et 1941, un peu moins de 200 000 Juifs polonais se sont réfugiés dans la zone d’occupation soviétique.

Bialystok ne fut qu’une étape pour les miens. Quelle fut la suivante ? Ce sera le sujet d’un prochain billet.

Léa de Kokjengak

2 Comments

  1. eisen

    bonjour
    je recherche une partie de ma famille qui était née en Russie et qui a émigrée en Amérique. comment faire savez vous comment faire et comment pouvait s’écrire autrement » eisenlis »merci

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    1. Léa de Kokjengak

      Bonjour,
      J’aimerais pouvoir vous renseigner mais le cas de la partie de votre famille dont vous parlez est assez différent de celui de ma propre famille. C’est pourquoi il m’est impossible de vous répondre. Peut-être pourrez-vous trouver des informations au centre de documentation du Mémorial de la Shoah.
      http://www.memorialdelashoah.org/index.php/fr/
      En vous souhaitant une bonne continuation dans vos recherches !

      Répondre

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